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DOUCES AMIES

Et mes lèvres couraient, poursuivaient ces flammes pâles, se perdaient en leurs ondes, buvaient leurs doux parfums.

Nuit d’enchantement, nuit de rêve !… Le Printemps nous versait l’arome de ses fleurs, l’émoi de ses haleines, le trouble de ses rêves.

Une pareille nuit ma douce aimée, illumine toute une vie. Et j’ai compris, en t’adorant, l’infinie volupté des amants exaltés, qui s’éperdaient aux seins de Cléopâtre, sans nul effroi, sans angoisses ni regrets, sachant qu’à l’aube ils seraient égorgés.

Oh ! mourir ainsi, mourir en pleine ivresse ! Ton désir soudain s’était allié au mien, fleuri au même instant au calice de nos cœurs. Ta voix si douce, ta voix si tendre murmurait son hymne d’allégresse, invitant au départ mystérieux dans l’inconnu :

— Aimer et mourir !

Aimer ! Aimer toujours, dans l’immortelle liesse !… Ou, s’il n’est pas au delà de cette terre un Éden pour les bien-aimants, se fondre à jamais en un suprême baiser, s’anéantir en s’étreignant dans le gouffre de la nature !…

Mais la vie bientôt nous rappelait à ses joies. Nos lèvres se reprenaient, tes seins palpitants fluaient jusqu’à ma bouche, nos bras se renouaient.