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DOUCES AMIES

Était-ce bien ma Suze ?

Sa beauté, plus radieuse, resplendissait dans la richesse des bijoux et des dentelles. Des gemmes éclataient parmi les ondes de ses cheveux ; des gouttes scintillaient sur sa gorge poudrée, cette gorge, dont je connaissais tout le mystère fleuri !

Très belles aussi, mais certes moins belles que mon adorée, d’autres femmes l’entouraient. Dans le fond de la loge, j’apercevais des habits noirs.

Suze, ma petite Suze… Somptueuse comme une princesse ! Lorsqu’elle venait aux rendez-vous, qui aurait cru en voyant ses costumes d’une exquise simplicité, qu’elle était une élégante, une grande mondaine !…

Alors, une tristesse atroce me pénétra.

Cet espoir que j’avais de la garder un jour, maintenant s’évanouissait… Notre amour ne serait, sans doute, que l’aventure galante d’une saison : un hasard la briserait… Et je me rappelai le sourire doux et triste qu’elle avait eu, le jour où je balbutiais des projets d’avenir…

À la fin du spectacle, mêlé dans la foule, près des portes, je la guettai. Et je fus très étonné de voir que ses amis la conduisaient vers un mauvais fiacre, où elle s’enferma, seule, après les adieux.