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DOUCES AMIES

rectification que vous m’indiquiez, « Oui, oui, vivre avec vous ! Une chaumière et un cœur ! » Non, le rêve impossible, je n’ai pas voulu, sans y croire, vous le formuler !

Vivre avec vous, seuls dans l’éternelle et délectable magie de l’Amour toujours renaissant, et toujours épanoui sur nos lèvres, en nos cœurs ! Suze idolâtrée, ce serait le ciel !… Mais le ciel, hélas ! n’existe plus sur terre… Pourquoi nous leurrer de décevants espoirs, énoncer d’irréalisables désirs ?… Ces innocents mensonges que murmurent les amants, je ne les puis balbutier, et les phrases coutumières, échos de livres ou de romances, que l’amant répète par habitude à la maîtresse, je ne sais pas les évoquer ; je ne veux pas…

Il me semble que ces phrases banales amènent entre Celle qui aime et Celui qui adore des fantômes ridicules, des ombres ironiques ; elles rappellent les aveux d’antan, les babils d’hier, tous les grotesques et ridicules souvenirs des tendresses enterrées… C’est comme un vieux refrain de la romance du cœur, toujours le même, obsédant et stupide, et qui fait que le couplet qu’on chante recommence la strophe fredonnée hier… Et j’ai peur, ma bien-aimée, d’être celui que vous aimâtes avant moi, j’ai peur que ce soit encore lui, un peu, que vous