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DOUCES AMIES

rêtaient toujours, au seuil du cher palais.

Tout à coup, vos yeux clos se rouvrirent et scrutant l’inconnu de mes yeux, tandis que vos mains éloignaient ma tendresse, vous avez murmuré, d’une voix si faible, si faible, d’une voix effarée et comme honteuse de réclamer l’aveu :

— Aimez-vous un peu Suze ?…

— Si je vous aime, ma bien-aimée, vous répondis-je alors, si je vous aime !…

Et pour vous exprimer toute ma joie sincère, toute mon adoration éperdue, je cherchais des formules glorieuses, des arguments tendres… Et je m’attristais, nul verbe ne jaillissant assez superbe, assez magnifique pour vous dire mon amour. Je balbutiai seulement :

— Suze ! Suze ! Je vous aime ! Je vous aime !…

Douces amantes, chères amantes, comme vous êtes supérieures dans toutes les choses d’amour !… Pour nous révéler votre cœur, un regard, un geste suffit… L’amour émane de vous tout entière, subtil arome qui nous grise aussitôt et nous donne l’assurance que nous sommes chéris.

Mais nous ?…

La flamme qui luit en nos yeux, la rage qui tressaille sur nos lèvres, est-ce de l’amour ?… N’est-ce pas le bestial et tumultueux éveil d’une