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DOUCES AMIES

espoir qu’ils seront recueillis et reçus dans le cœur.

Premiers baisers !… Comme on palpite et comme on tremble !… Très doucement on lutte, pour vaincre la résistance éperdue de vos lèvres peureuses, de vos dents menaçantes. Car toujours ainsi vous vous défendez ; vous avez livré les roses humides et frissonnantes, mais vous fermez les murailles acérées d’émail, voulant refuser le baiser suprême par lequel il vous semble que vous livrez votre âme et signez le pacte définitif qui donne l’amante à l’amant.

Lutte troublante. Lutte délicieuse. Des morsures nous déchirent : chère et suppliciante douleur. Voulez-vous déjà enseigner à l’ami que la caresse la plus douce est aussi une torture, et qu’à chaque heure d’amour en même temps que les rires, les larmes s’épanouiront ?…

… Nous nous étions réfugiés dans le propice asile d’une voiture ; les stores baissés nous abritaient contre les curiosités hostiles des passants… Le cocher nous conduisait à sa guise par les rues des faubourgs…

Si vous n’aviez dérobé vos lèvres, je vous aurais tenue des heures et des heures, enlaçant votre gorge, buvant la fraîcheur embaumée qui s’exhalait de votre bouche, m’acharnant à disjoindre les courageuses petites dents qui m’ar-