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DOUCES AMIES

Mon orgueil attribuait ces grands transports de volupté à l’énergie de mon amour, à l’impétuosité de ma passion. Oui, oui, Riquette disait vrai : elle s’était animée dans mes bras.

La Galatée de marbre pur était devenue une palpitante chair, une incomparable voluptueuse.

Et les heures tintaient, tintaient à la pendule ; la nuit s’avançait. Nos bouches ne se déliaient pas.

Pourtant, une torpeur m’envahissait. Mes yeux se fermaient ; mon esprit s’alourdissait… mais les baisers de Riquette me brûlaient, me disputaient au sommeil.

L’anéantissement, très doux, m’accabla à la fin ; je cédai, ne pouvant plus déclore mes paupières terrassées…

Et j’eus un cauchemar : Riquette, vêtue, enveloppée dans son manteau, avait ouvert la porte : elle me disait adieu, puis elle disparaissait. Je voulais m’élancer, pour la retenir ; mais j’étais cloué, écrasé sur le lit ; je m’acharnais inutilement en efforts stériles pour me lever, courir, reprendre mon amie… et je demeurais seul, paralysé, enchaîné dans un noir cachot, où il n’y avait plus désormais que du noir et de la ténèbre…

Un cauchemar ?…

Quand j’ouvris les yeux, au matin, la petite