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DOUCES AMIES

senti que celle-là contenait la lettre espérée, la lettre de l’inconnue tant de fois appelée, inutilement cherchée, et qui se révélait enfin !

Oui, cette lettre, je le savais, m’apportait le bonheur…

Lorsque mes doigts l’ouvrirent, elle tremblait entre mes mains.

En la dépouillant, il me semblait que l’heure suprême sonnait, où l’aimée s’abandonne, où les derniers voiles s’effondrent, où l’adorée surgit toute nue, resplendissante et se livre au baiser.

Un parfum doux et pénétrant s’exhalait de la lettre.

Je fermai les yeux et me livrai à l’alanguissement de cette indéfinissable odeur de bouquet et de chair.

Et je crus un instant que ma bouche s’éperdait à chercher des effluves enivrants en de mystérieuses cassolettes pleines d’encens féminin, brûle-parfums mystérieux où flambe l’or des toisons pour embaumer le sanctuaire d’amour.

Que me disait-elle alors, la bien-aimée ? Quelques mots. En somme, peu de chose. Mais il m’était clair que ce rien serait tout. Et je m’acharnais à évoquer l’image de celle qui m’écrivait.

Au papier d’azur clair, à l’écriture fine et jolie,