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DOUCES AMIES

chandes de chair humaine m’a jeté presque à la porte, en me déclarant : « Toi, mon vieux, t’es de la police. Tu viens ici, tous les jours, tu ne consommes pas, tu n’es même pas un voyeur, et tu paies sans rechigner : ça n’est pas naturel ! Je me méfie de clients pareils. »

Alors, j’ai dû choisir au hasard une vendeuse de caresses et accepter ses services — sans aucune joie — pour avoir le droit de reparaître dans cette maison où je sais que Riquette, il y a quelques semaines, venait chercher quelques louis.

Et c’est ainsi chaque jour ; je suis devenu un bon client… Ces débauches, par instants, me donnent des nausées, et cependant je mentirais si je n’avouais pas que j’y trouve toutefois un plaisir très vif, de vanité, de gloriole bestiale, en constatant que, malgré mes cinquante ans passés, je suis encore un très vert et très robuste galant…

Un soir, j’ai eu, durant quelques minutes, une vive émotion. Chez la mère Simon, à peine entré, je crus reconnaître Riquette. Mon cœur battit à se rompre. J’approchai. Hélas ! ce n’était pas elle. Une petite femme ressemblait à mon amie, je la pris, et voulus me donner l’illusion d’étreindre l’adorée. Mais brusquement, dans une crise absurde d’attendrissement, je me mis