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DOUCES AMIES

été dispersées à l’encan. J’ai reconnu, chez une marchande à la toilette, tout un lot de vieilles nippes défraîchies, que tu avais portées : je les ai reconquises… Et, dans ces étoffes, j’ai savouré délicieusement la forte et inoubliable odeur de ta peau !…

D’après des indications qui m’ont été données, Riquette, à bout de ressources, est tombée, de chute en chute, aux maisons de passe du faubourg Montmartre. Je tremble de la rencontrer un soir, parmi les lamentables rôdeuses qui traînent dans ce quartier, s’offrant à tout passant…

Et pourtant, là ou ailleurs, qu’importe, pourvu que je la revoie, que je l’arrache à la tristesse, à la fange, à la misère !…

Sans doute, son orgueil est aujourd’hui brisé ; elle me pardonnera mes exigences ridicules, mon abandon, mes caprices. Elle sera peut-être heureuse… heureuse, ma Riquette… je n’ai plus d’autre souhait désormais : son bonheur…

Cette chasse à travers les maisons de rendez-vous me devient chaque jour plus odieuse. Les proxénètes, qui m’accueillaient d’abord avec empressement, peu à peu sont devenues hargneuses. Mes allures inquiètes, mon refus d’accepter les jolies filles qu’elles offrent, m’ont rendu suspect. Dernièrement une de ces mar-