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DOUCES AMIES

Et pourtant, je ne regrette rien.

Durant ces mois, si j’ai saigné, si j’ai pleuré, si j’ai connu d’épouvantables meurtrissures, j’ai eu des heures délicieuses, incomparables. Une de ces heures suffit pour vous donner ensuite la force d’accepter toutes les détresses. Leur souvenir est ma seule consolation maintenant.

Ah ! je l’ai bien aimée, cette petite Riquette, — d’amour profond, d’amour superbe ! — Et elle ?… Mais je suis sûr qu’elle aussi, elle m’aimait… Oui, j’en suis bien certain. Elle n’était pas de celles qui jouent des comédies de tendresse et d’affection. Elle n’a pas le talent de ces immondes simulacres… Oui, oui, oui, et c’est ma joie maintenant de me l’affirmer : Riquette m’a aimé !…

Ah ! ces nuits délicieuses, que ma mémoire parfois ressuscite, avec une telle intensité qu’il me semble que je les revis ! Avec quelle grâce gamine et délicieuse elle s’abandonnait à mes caresses. Qu’il était bon, le goût de sa chair ! Ses yeux alanguis avaient des rayons de volupté reconnaissante.

Je revois ce joli corps nu qui se pâmait sous mes baisers, avec la palpitation tumultueuse des seins, la convulsion délirante des bras et des jambes !

À cinquante ans, alors qu’on est presque un