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DOUCES AMIES

mais pour vivre ? Habitué aux conforts, aux luxes de notre époque, je devrai me contenter de rentes mesquines : ce ne sera pas la médiocrité, mais la pauvreté !

Cette économie sordide à laquelle je suis maintenant condamné m’est pénible, difficilement supportable.

Pour occuper mes loisirs, j’ai voulu faire de légères transformations dans le parc des Fresneaux, agrandir les bâtiments, planter des arbres et des fleurs rares et l’argent m’a manqué.

Je suis un rôdeur, un vagabond, sur mes terres.

Les gens d’ici savent que je suis ruiné et me marquent leur mépris par mille gestes insolents.

Il serait préférable que je vende cette vieille propriété, si pleine de souvenirs ! J’irais alors finir mes jours très loin, parmi des étrangers, je subirais leur indifférence sans aucune tristesse.

Mais le mépris, presque la haine de ces paysans qui me regardaient autrefois comme leur maître, je ne puis subir cela. Je partirai… J’ai déjà prié mon notaire de vendre les Fresneaux. Si l’on ne trouve pas un acquéreur, dans des conditions acceptables, on morcellera le domaine, on le déchiquettera, et chaque paysan en prendra un lambeau…