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DOUCES AMIES

Vraiment, il avait l’apparence sympathique et attirante. Tout jeune, portant au plus vingt-cinq ans, il se présentait avec une distinction et une déférence parfaites. Je constatai de suite qu’il était très beau, non pas de cette beauté agaçante du bellâtre et de l’homme à femmes professionnel, mais de cette magnificence très rare, faite d’harmonie et de charme que possèdent certains hommes et que, sans fatuité, j’avais possédées, moi aussi, entre vingt et trente ans…

Je considérais ce jeune homme avec insistance, et je me sentais presque son ami.

Oui, loin de le maudire, j’étais tenté de l’accueillir comme un grand fils qu’on n’a pas vu depuis longtemps. Son aspect général me rappelait le jeune homme que j’avais été. Ce regard franc, loyal, énergique ; cette voix à la fois autoritaire et caressante, cette mine orgueilleuse et un peu provocante, je les avais eus aux jours hélas lointains de mon adolescence.

Je demandai au jeune homme la raison de sa visite. Il sembla gêné, hésitant. Puis, lentement, il murmura :

— Pardonnez-moi, monsieur… ce qui m’amène devant vous est une chose étrange… Vraiment, vous allez me juger très indiscret, très audacieux. Je ne sais pas si vous allez me comprendre. Mais vous me paraissez très bon…