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DOUCES AMIES

qui rôdent autour des concerts d’été pour s’offrir un spectacle gratuit. Oui, je guettai Riquette, bien décidé à la surprendre et à lui montrer que je n’étais pas le vieillard complaisant qui supporte toute honte et toute infamie.

Je ne me trompais pas. Je la vis bientôt, enveloppée dans son grand manteau blanc, accompagnée d’un jeune homme, dont l’allure et l’orgueil manifestaient une joie excessive.

Dès qu’ils eurent traversé la foule, au lieu de monter en voiture, ils marchèrent lentement, dans le parc qui s’étend de la Concorde au Rond-Point des Champs-Élysées.

Pour les épier sans être reconnu, je cherchai à me travestir, en levant le col de mon manteau d’été, et en me cachant à demi le visage sous un foulard. Précautions inutiles du reste : Riquette s’inquiétait peu des regards curieux ! Elle avait pris le bras du jeune homme, se penchait sur lui amoureusement, cherchait ses lèvres et l’embrassait…

Ils allèrent s’asseoir sur un banc. On eût dit un étudiant et une modiste, à l’aurore d’une passion jeune et ardente. Ils parlaient peu. Ils se prenaient les mains, se caressaient, se rapprochaient, mêlaient leurs têtes en de longs baisers.

Pas un instant je n’eus la tentation d’interrompre cette idylle.