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DOUCES AMIES

Je rentrai, perclus, marchant à grand’peine. Riquette bientôt fut endormie. Toute la nuit je me traînai dans la chambre, énervé, irrité défaillant, pleurant. À l’aube, je courus éveiller l’hôtelier. On alla me chercher des médicaments. Riquette dormait toujours.

Lorsqu’elle s’éveilla, j’avais absorbé de nombreux narcotiques.

— Ah ! fit-elle, quel calme, quel enchantement ! Et dire qu’on est assez tourte pour préférer Paris !… As-tu bien dormi, mon loup ?

— Oui, très bien, affirmai-je.

— Tu étais fatigué, hier soir ; c’était sans doute le grand air. Ah ! tu n’étais pas brillant, en amour…

« Tu n’étais pas brillant en amour !… » Ces mots cinglèrent mon pauvre orgueil masculin comme un coup de fouet.

J’ouvris la bouche pour parler et dire mon courage durant toute cette soirée : mais je compris que ce serait immensément idiot de conter à ma petite amie mes histoires de rhumatismes ; et je subis l’humiliation en souriant, tel un martyr.

Du reste, Riquette ne rappela pas les souvenirs de cette soirée. Elle fut charmante. Quant à moi, j’avais une peine inouïe à secouer l’engourdissement et la torpeur que les