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DOUCES AMIES

— Ah ! les cochons ! les cochons ! hurlait Riquette. Pas un ne vient… on crèverait comme un chien… Quand on n’est plus bonne pour la rigolade, on vous oublie, vous ne comptez plus…

Je balbutiai :

— Riquette !…

Elle murmura :

— Ah ! c’est vrai, tu es là, mon bon vieux. Oh ! ce n’est pas pour toi que je dis cela, mais pour les camarades du beuglant. Pas un n’est venu prendre des nouvelles ; ils m’envoient, par lettres, des phrases banales… Cochons ! cochons !… Tas de cochons !…

D’autres petits bleus arrivèrent, pareils sans doute aux précédents. Riquette pleura de rage.

La journée se passa… puis la nuit. Riquette consentit à me garder, près de son lit. Jusqu’à la fin de sa maladie, je restai.

Peu à peu, un grand changement se produisit dans le caractère de mon amie. Elle devenait plus douce, presque tendre. Des heures entières, elle me prenait la main, la tenait dans les siennes. Elle me disait : « Tu te tues, mon chéri, tu te fatigues, tu es bon, bon, très bon ; je t’aime beaucoup !… »

Et ces mots, délicieusement, pénétraient en moi, m’enchantaient. Et dans l’égoïsme de ce