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DOUCES AMIES

qu’on me conduise chez moi… je crois que je vais mourir… je ne veux pas que ce soit ici.

Je la pris dans mes bras. Je courus comme un fou, portant le cher fardeau, à travers les couloirs et les escaliers. Puis, doucement, je la posai sur les coussins d’une voiture. Épouvanté, je la regardais, à la lueur des lanternes. Son visage avait une teinte livide, ses dents étaient serrées ; des râles s’étouffaient dans sa gorge… Assurément, elle était atteinte de quelque mal mystérieux et terrible…

Je la couchai sur son lit. Un médecin accourut. Il formula une potion et refusa de répondre à mes questions, d’apaiser mes craintes.

Je m’installai, comme garde-malade, près de ma pauvre petite amie. Après avoir absorbé quelques cuillerées du médicament, elle s’endormit d’un sommeil profond ; et durant toute la nuit, anxieux, angoissé, j’épiai le moindre des mouvements de ses paupières, de ses lèvres.

Vaincu par la fatigue, je m’assoupis, au matin, dans mon fauteuil.

En ouvrant les yeux, je vis Riquette, toujours très pâle, la tête un peu relevée sur la dentelle des oreillers, dictant des lettres à sa femme de chambre ; il y en avait déjà cinq ou six ; la domestique les mit sous enveloppe et alla les jeter à la poste.