Page:Emery - Douces amies, 1920.djvu/255

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
250
DOUCES AMIES

Mon amour pour Riquette a survécu à l’épreuve de l’étreinte,

Je redoutais cette heure angoissante de la possession ; je la retardais, dans l’épouvante qu’elle sonnerait la mort de ma fraîche et délicieuse affection.

Au contraire, il me semble que le lien est maintenant plus fort, plus tenace.

Riquette, de son côté, est plus aimante, plus câline.

Chaque jour, de deux à quatre heures, nous nous aimons, passionnément, comme des fous,

J’aurais voulu vivre avec elle, chez elle, ne jamais plus la quitter. Mais elle m’a fait comprendre que sa situation d’artiste en vogue, de petite étoile de concert parisien, s’oppose à mon projet, dont la réalisation l’eût également enchantée. Le soir, après le spectacle, elle a besoin de repos. Elle rentre, bien sagement, la chère enfant, et dort seule, comme une petite pensionnaire. Sa santé, du reste, n’est pas robuste,. Les dures années de gêne, presque de misère, qu’elle a subies, l’ont anémiée. Le docteur lui a imposé un régime sévère. Parfois je me reproche mes exigences sensuelles, mes caresses quotidiennes ; mes baisers trop fréquents, qui la fatiguent.

Ce n’est pas l’appétit charnel, le besoin brutal et gourmand de ma chair irritée qui me jette