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DOUCES AMIES

nourritures de choix dans un restaurant de la place Pigalle.

Je n’eus pas à chercher bien longtemps l’occasion.

— Il fait soif, dit l’une : personne n’aura donc la bonne idée de nous offrir l’apéritif !

Elle me regardait ; je compris.

— Si vous voulez me faire le plaisir d’accepter des boissons variées…

— Mais avec joie et délices. J’ai le gosier en flammes…

On lia facilement conversation. Les deux petites femmes m’apprirent qu’elles étaient artistes lyriques. Elles chantaient dans les cafés-concerts. Sans engagement depuis quelque temps, elles étaient devenues la proie de la « guigne au cul verdâtre… telle fut leur expression. »

Ah ! si elles avaient voulu, comme tant d’autres, s’abaisser aux retapes, aux raccrochages, bien sûr, elles eussent gagné au moins de quoi subsister jusqu’à la saison nouvelle de la réouverture des boîtes à musique. Mais elles n’étaient pas des morues, non, non ! Et avec fierté elles se proclamaient artiste.

Elles ne firent aucune difficulté pour accepter le dîner que j’offris. Elles avaient le bel appétit de leur âge. Et une soif !…