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DOUCES AMIES

rapproche peu à peu des êtres supérieurs, de ces purs et divins esprits auxquels nous nous mêlons, sans doute, après la mort.

Car, ainsi que le disait à peu près un grand poète, dont les Méditations enchantaient mes rêveries de seize ans, aimer pour être aimé, c’est de l’homme ; mais aimer pour aimer, c’est de l’ange…

Un ange… Je suis donc presque un ange !… Ah ! le bel ange aux cheveux teints, aux bajoues maintenues par le massage, aux rides émaillées par le cold-cream et le fard !…

II

Ce soir-là, j’étais entré vers six heures dans un cabaret amusant de Montmartre ; quelques jeunes hommes chevelus babillaient, se grisaient de paroles et d’absinthes.

Tout près de moi, devant une table sans consommations, deux petites femmes jasaient…

Blondes toutes les deux, très jeunes, jolies, l’une surtout captivait mon regard. Ses yeux bleus, d’un bleu vert de turquoise morte, avaient