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DOUCES AMIES

M. de Santillon avait raison. Et moi, à cette heure, je mentais. L’idée de ce mariage plus d’une fois m’avait hantée. Souvent, nos soirs d’amour, Marcelle me disait de sa voix caressante : « Oh ! demeurer ainsi l’un à l’autre enlacés, toute la nuit… toute la vie ! » Elle m’invitait ainsi à l’union durable du mariage. Mais jamais je n’avais voulu comprendre ! Je sentais, dans son passé, des mystères troubles et inquiétants. Je l’adorais comme maîtresse. Mais comme femme, non, non… Les vieux préjugés familiaux qui hantent toujours nos esprits nous crient qu’on n’épouse qu’une vierge. Et ces principes démodés ne sont peut-être pas stupides… Nos cœurs peuvent s’affranchir des Codes, des morales ; ils ne peuvent se guérir de l’atavique et farouche jalousie… Bien des fois, dans les bras de Marcelle, ma bouche sur sa bouche, j’avais ressenti les obscures souffrances de ce sentiment despotique et suppliciant ; une amertume avait jailli, empoisonnant les allégresses qu’elle me donnait. Je retrouvais, sur ses lèvres, la trace d’anciennes caresses, l’empreinte d’autres amants. Et subitement alors, une haine farouche contre elle m’envahissait. Mon baiser se transmuait en morsure hostile…

Épouser Marcelle…

Ah ! pourquoi n’avais-je pas lié nos deux ten-