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DOUCES AMIES

nable pour expliquer que Marcelle me jouât, elle aussi, cette parodie de l’amour, j’en arrivais à conclure que c’était une de ces femmes à tempérament excessif, qui recherchent un homme pour la sensualité robuste et raffinée qu’il sait offrir à la gloutonnerie de l’amante, mais que son cœur demeurait vierge, aux heures les plus superbes de l’union amoureuse…

Non, jamais je n’avais ressenti, dans ses bras, cette sécurité profonde et apaisante d’être aimé délicieusement, totalement, souverainement…

L’ai-je connue jamais ?

Un soir cependant… Ce fut comme le frôlement d’une aile angélique, qui me caressa le cœur.

Nous étions assis, sur un banc, devant le grand lac du Bois de Boulogne. Nous étions seuls, loin de la voiture qui nous avait amenés… Nous ne parlions plus… nous admirions le frémissement des eaux, sous la clarté lunaire.

— Mais si j’allais t’aimer ? me dit-elle tout à coup.

Ce soir-là, ma tendresse pieuse et passionnée l’avait emportée loin, très loin, dans l’azur et le trouble lumineux du paradis des rêves ; elle s’abandonnait, un peu émue, à la douceur d’être adorée, cajolée, câlinée.

Ses yeux s’alanguissaient. Sa gorge palpitait.