Page:Emery - Douces amies, 1920.djvu/174

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
DOUCES AMIES

Tes yeux étaient fermés. Je te croyais maintenant, engloutie dans un sommeil profond. Lentement, je me soulevais, pour admirer encore la face de volupté et d’extase, que j’avais aperçue, en mon assomption… Mais tes paupières lourdes tressaillirent, descellées. Et je revis tes yeux, plus doux, plus attendris, noyés dans le grand cercle bleu des paupières meurtries… Ma joie se raviva ; et ma bouche se posa doucement sur ces marques sacrées, qui m’attestaient sûrement, mieux que tout autre signe et mieux que des serments, que tu m’avais aimé !…

À cet instant, ma bien-aimée, j’atteignis le sommet de l’allégresse humaine… Jusqu’à l’heure où je dus m’arracher de tes bras, je contemplai tes paupières. Nul spectacle céleste ne m’eût apporté des ravissements comparables à ceux qui me furent donnés par la vue de ces deux taches bleues…

Tu m’as aimé ! Tu m’as aimé ! j’en ai la certitude !…

Ah ! mon enchanteresse, pour t’exprimer ma joie et ma reconnaissance, je voudrais connaître des mots doux comme des caresses que personne encore n’a écrits. Je te disais, cette nuit, Marcelle, je t’adore ! Mais aujourd’hui, ce n’est plus seulement de l’adoration qui remplit mon cœur, c’est un sentiment plus immense,