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DOUCES AMIES

Il y avait, dans les feuillages, un grand hamac. avec des coussins moelleux, encore froissés, où sans doute Marcelle, les jours précédents, s’était livrée à des caresses, à des baisers. Il flottait dans ce coin, une vague odeur d’amour ; j’aperçus un bouquet de violettes fanées, et plus loin sur le sable, un gant d’homme, oublié…

Ah ! Marcelle perfide !… Tu n’étais donc pas l’amie grave et solitaire qui attendais comme moi, depuis de longs mois, l’heure douce, l’heure recueillie d’une passion glorieuse !… Petite femme frivole, tu sèmes tes baisers au hasard des rencontres et des fantaisies… Je comprends maintenant pourquoi M. de Santillon ne me répondait point, quand je l’interrogeais… Il ne voulait pas te diffamer, en me disant la vérité…

Marcelle s’était étendue sur les coussins… ses yeux demi-clos, avaient leur sourire triste d’angoisse et de mystère…

Et je restais debout, appuyé contre un arbre. Tout au fond de mon cœur s’agitait un marécage de pensées limoneuses ; de la haine, de la désolation, de la luxure, se soulevaient, tourbillonnaient. J’étais atteint par toutes ces fanges, et comme noyé dans leur épaisse bouc.

Ah ! vraiment, me disais-je, je ne suis qu’un stupide Joseph ! Une proie délicieuse de volupté