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DOUCES AMIES

sentiments réels, son caprice d’un jour, qui n’aurait pas de lendemain.

Souvent ainsi nous croyons lire dans les yeux d’un être aimé, sa profonde pensée, alors que nous y découvrons seulement le reflet de la nôtre…

Oui, oui, c’était bien cela : Marcelle, sous l’influence de ce printemps nouveau et de ses émois troubles, était prête à cueillir la volupté qui passe !… Sa chair se réjouirait…

Mais je voulais son cœur !…

Aussi, je pris la résolution de ne point céder à nos désirs ardents. Non, je n’accepterais pas cette trop facile conquête… Non, je ne prendrais pas la grappe de plaisir qu’elle voulait m’offrir

Je savais bien comme est ridicule le rôle de l’amant qui se dérobe devant l’étreinte suprême et semble repousser l’amie qui s’abandonne… Mais je pensais, par cette résistance à mes désirs violents, assurer l’avenir de notre passion, démontrer à Marcelle que je l’aimais infiniment, d’un amour surhumain…

Elle traversa un bouquet d’arbres, et nous fûmes devant la rivière frissonnante qui limitait le parc.

J’aperçus alors, dans un massif d’arbustes verts, un nid de volupté. Aussitôt des visions douloureuses me hantèrent…