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VIII

Elle marchait devant moi, à travers les allées étroites. Elle ne parlait pas… J’admirais la splendeur grasse et souple de son beau corps. J’avais la tentation de me jeter sur elle, d’emprisonner sa taille en mes mains caressantes.

Elle n’eut pas résisté, j’en étais convaincu. Je comprenais la complicité de sa chair en délire. N’avais-je pas surpris, tout au fond de ses yeux, la flamme tremblante du désir, alors que sa poitrine battait contre la mienne.

Mais je luttais contre ma folie. Je me disais que nous allions, peut-être assassiner notre chère tendresse, en nous possédant trop vite, à l’aube de notre amour…

Car je me rappelais ses paroles impies :

— Aujourd’hui, je te plais, tu me désires… tu veux cueillir une grappe de plaisir !…

Pourquoi les avait-elle prononcés, ces mots de crainte obscure ? Avait-elle eu alors un de ces pressentiments mystérieux qui révèlent à l’âme des femmes les secrets du futur ?… Ou bien, n’était-ce pas son cœur qui m’avait avoué ses