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DOUCES AMIES

nouaient, comme pour se dissoudre les uns dans les autres.

Lentement, lentement, nos têtes s’approchaient.

Alors, graves, fervents, nos yeux s’abandonnèrent.

D’elle, je ne voyais maintenant que les yeux : ses chers yeux, si profonds, ses yeux d’azur céleste, ses yeux comme l’espace bleus, vastes, infinis…

Nos lèvres étaient closes, et nos corps immobiles, figés dans une raideur de statues extatiques.

Nous avons vécu là des heures incomparables.

Nos yeux s’abandonnaient : nos yeux se pénétraient. Ils entraient dans un ciel de douceur, d’allégresse. Elle lisait en moi, l’immense adoration. Je découvrais en elle la tendresse palpitante.

Toute notre vie, tous nos espoirs étaient montés dans nos yeux. Dans les siens, je cueillais une moisson de joies : elles entraient en moi, circulaient en mon sang. Dans mes yeux je faisais jaillir aussi pour elle mon amour éperdu : je proclamais le cher enchantement que son charme, sa grâce avaient créé en moi et l’admiration pieuse de sa beauté.