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DOUCES AMIES

tère de la vie nous unit-il peut-être à ces instants ; et le mirage est-il une vraie et réelle communion, où nos désirs se mêlent, où nos chairs se confondent ? Oui, je le crois parfois. Car les rêves laissent-ils une impression aussi tenace, aussi profonde ? Les mirages ont-ils une splendeur si nette et si merveilleuse ?

Certains jours, poussé par je ne sais quelles forces mystérieuses, je vais au loin, je parcours des villes inconnues, persuadé que c’est là que je vais te rencontrer enfin. Au départ, dans les gares, si quelque voyageuse, seule, rôde aussi comme moi, mon cœur alors s’émeut.

Si c’était Toi !

Et je pense au plaisir d’être emportés ensemble par les trains, d’être seuls dans le même compartiment et de se reconnaître après la longue attente.

J’ai connu plus d’une fois le charme de ces idylles, de ces amours de chemins de fer ; j’en ai conservé d’aimables souvenirs. On est un peu grisé par le mouvement et le bercement des wagons, par la fuite rapide et amusante des paysages, par le tournoiement des forêts, des collines, par la succession des villes et des hameaux ; les baisers ont une saveur plus âcre, plus étrange, durant le voyage…

Mais non, tu n’es pas là. Et je ne t’aperçois pas