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DOUCES AMIES

splendeur à leurs gloires. Non, toi, tu es l’unique, l’aimée, l’idolâtrée.

Toi ?

Toi qui seule, là-bas m’appelle et me désire. Tu me cherches partout. Quand donc, nos yeux émus trouveront-ils leur joie !…

Tu ne m’as jamais vu, encore, et tu ignores tout de moi. Mais pourtant tu me connais déjà. Partout, tu m’as cherché, dans la rue, dans les rêves ; et tu m’as appelé à ces heures de tristesse où l’on a l’âme mourante, où les yeux se mouillent de larmes, où l’on se désole, où l’on maudit presque la vie, parce que le cœur palpite, se débat, se dresse pour l’amour — mais sans être exaucé.

Es-tu vierge ?…

Peut-être. Alors tu me désires, tu veux être initiée par moi et balbutier, réfugiée dans mes bras, les premiers émois de ton cœur qui s’éveille et les premières joies de la chair qui se tord.

J’ai hanté, très souvent, tes nuits, tes insomnies. Et la voix qui chuchote, à tes oreilles, des mots si légers, si menus, qui te font tressaillir d’espoir ou d’épouvante, c’est la mienne, apprends-le, ma douce, douce amie.

As-tu connu déjà l’étreinte ; et, dans l’extase de la chair et de l’âme, es-tu montée au ciel ?