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DOUCES AMIES



J’étais assis devant le petit lac qui charrie lourdement ses nappes rouillées à travers le parc de Forges-les-Eaux. Je contemplais les reflets mordorés, les moires scintillantes de ces ondes épaisses, en attendant l’apparition de la délicieuse anémique, qui chaque matin, à cette heure, m’accordait la grâce de ses babils et le clair rayonnement de ses yeux glauques, si doux.

Mais elle n’arriva pas.

À sa place, ce fut un habitué de la salle de jeu qui vint s’asseoir près de moi.

Je le connaissais, depuis plusieurs mois, pour l’avoir maintes fois rencontré dans des cercles et des casinos. Souvent, il m’avait adressé la parole ; mais je lui répondais toujours par ces phrases brèves, hautaines, qui marquent la volonté de repousser toute tentative de relations ou de camaraderie.

C’était un homme d’une cinquantaine d’années, distingué, poli, au regard triste, qui inspi-