de rendre ce qui est grand, petit, et ce qui est petit, grand ; mais j’estime que le moment où l’art atteint à sa perfection, c’est celui où, à travers tous les déguisements, l’orateur voit les balances éternelles de la vérité, de sorte qu’il peut résolument présenter aux yeux de l’homme les faits d’aujourd’hui évalués à leur juste mesure, rendant par là grand ce qui est grand, et petit ce qui est petit — véritable manière d’étonner et de réformer l’humanité.
Tous les grands orateurs du monde ont été des hommes graves, s’appuyant sur cette réalité. Les philosophes du temps de Démosthène ont remarqué une pensée qui se retrouve à travers tous ses discours — à savoir, que « la vertu s’assure son propre succès ». « S’appuyer sur soi-même », voilà, remarque Heeren, le thème des discours de Démosthène, aussi bien que de ceux de Chatham.
Comme tous les autres arts, l’éloquence repose sur les lois les plus exactes et les plus précises. C’est le discours supérieur de l’âme supérieure. On peut la regarder comme le signe de tout ce qu’il y a de grand et d’immortel dans l’esprit. Si elle ne devient pas ainsi un instrument, mais aspire à être quelque chose par elle-même, à briller pour s’exhiber, elle est fausse et sans force. Dans son exercice légitime, c’est une puissance élastique, inépuisable — qui l’a sondée ? qui l’a appréciée ? — elle s’élargit avec l’extension de nos intérêts et de nos sentiments. Tout en tenant compte de ce qui pouvait aider à son acquisition, tout en ne jugeant aucun labeur trop pénible s’il pouvait en quelque manière contribuer à son progrès — ressemblant par là au célèbre guerrier arabe qui portait dix-sept armes à sa ceinture, et dans le combat