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le désire, et dirigera la conversation — quels que soient le génie ou la distinction que puissent avoir les autres personnes présentes ; et dans toute réunion publique, les gens écouteront celui qui possède les faits, qui peut et veut les exposer, alors même qu’il serait par ailleurs un ignorant, alors même qu’il aurait la voix rauque et serait disgracieux, qu’il bégaierait et crierait.

Au Tribunal, l’auditoire est impartial ; il désire réellement approfondir les assertions et savoir où est la vérité. Et dans l’interrogatoire des témoins, il surgit d’ordinaire, et d’une façon tout à fait inattendue, trois ou quatre paroles ou phrases qui reviennent constamment, sont la moelle et le point décisif de l’affaire, entrent dans la tête de chacun, y demeurent et tranchent la cause. Tout le reste n’est que répétitions et mitigations, et la Cour et le Comté se sont en réalité réunis pour arriver à ces trois ou quatre paroles mémorables, qui révèlent le sentiment et la pensée de quelqu’un.

En toute société, l’individu qui connaît les faits est comme le guide qu’un groupe d’amis et vous engagez pour faire l’ascension d’une montagne, ou vous conduire à travers un pays difficile. Il se peut qu’au point de vue de l’esprit, de l’éducation, du courage, ou des biens, il ne puisse soutenir la comparaison avec aucun des membres de votre groupe ; mais dans les circonstances présentes, il est beaucoup plus important qu’aucun eux. C’est là ce que nous avons en vue quand nous allons au Tribunal — nous voulons voir le fait général dégagé, la relation exacte de toutes les parties ; et c’est la certitude avec laquelle en une affaire quelconque bien conduite, la