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faire parmi des voleurs, une populace furieuse, ou des cannibales ? Face à face avec un malfaiteur de grand chemin qui a toutes les tentations et opportunités en matière de violence et de vol, pourriez-vous vous sauver par votre esprit, manifesté en vos discours ? — problème assez facile pour un César ou un Napoléon. Chaque fois qu’arrive un homme de cette trempe, le voleur de grand chemin a trouvé son maître. Quelle différence entre les hommes dans la puissance d’expression de la physionomie ! Un homme réussit parce qu’il a dans les yeux plus d’autorité qu’une autre, et par là le séduit ou l’intimide. Toutes les semaines, les journaux racontent l’histoire de quelque impudent chevalier d’industrie qui, par ses airs d’assurance, a dupé ceux qui auraient dû s’y connaître davantage. Cependant tous les escrocs que nous avons connus étaient des novices et des maladroits, comme le prouve leur mauvais renom. Une expression de physionomie plus puissante réussirait en quelque chose que ce fût, et ferait disparaître le mauvais renom avec le reste de leurs prises. Une plus grande aptitude à conduire l’affaire de haut, avec une assurance parfaite, confondrait marchands, banquiers, juges, hommes d’influence et d’autorité — poètes et présidents — pourrait se mettre à la tête de n’importe quel parti, renverser n’importe quel souverain, et abroger n’importe quelle constitution d’Europe ou d’Amérique. On a dit que celui-là atteint du premier coup à une force immense qui a renoncé au sentiment moral, et décidé avec lui-même de ne s’attacher désormais à rien. On a dit de Sir William Pepperel, un des hommes illustres de la Nouvelle-Angleterre, que « où