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Gœthe a remarqué, de même, que le granit se fend en parallélépipèdes dont une partie, si on les brise en deux, a la forme d’un obélisque, et que dans la Haute Égypte les habitants marquent tout naturellement un endroit mémorable en y dressant une pierre bien en vue. Comme il l’a suggéré également, dans un mur de pierre ou sur un fragment de rocher, nous pouvons voir la saillie des veines de la pierre plus dure qui a résisté à l’action de la gelée et de l’eau décomposant le reste. Ces traces ont certainement donné l’idée des hiéroglyphes inscrits sur les obélisques. Quiconque observe la foule courant dans la rue pour regarder un combat, une personne prise de malaise, une figure bizarre, peut voir l’origine de l’amphithéâtre des anciens Romains. Les premiers arrivés s’assemblent en cercle ; ceux qui sont derrière se tiennent sur la pointe des pieds ; les plus éloignés grimpent sur des barrières ou des rebords de fenêtre, et forment ainsi comme une coupe dont l’objet de l’attention occupe le creux. L’architecte y met des bancs, entoure la coupe d’un mur — et voilà un Colisée !

Il est beaucoup de choses dans le monde, dans les coutumes des nations, l’étiquette des cours, la constitution des gouvernements dont il serait facile de montrer l’origine en de simples nécessités locales. L’art héraldique, par exemple, et les cérémonies d’un couronnement, sont une répétition magnifiée des incidents qui pouvaient survenir à un dragon et à son valet d’armes. Le Collège des Cardinaux était tout d’abord l’ensemble des prêtres paroissiaux de Rome. Les tours penchées doivent leur origine aux discordes civiles qui incitaient chaque seigneur à