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empressée et courageuse s’arrêtera, et ils retourneront chez eux d’un pas plus lourd et prématurément vieillis. Ils fourniront eux-mêmes assez vite au froid misérable l’observation dont il a besoin. Lequel d’entre eux n’a pas réussi à plaire là où il le désirait le plus ? ou commis des bévues là où il avait le plus l’ambition de réussir ? ou ne s’est trouvé gauche et ennuyeux, incapable d’étude, de pensée, d’héroïsme, ne gardant que l’espoir d’arriver par le bons sens et la persévérance à faire ce qu’il devait et à n’encourir aucun blâme ? Et avec ces satires et son scepticisme, ce spirituel malfaiteur diminue leurs pauvres espérances, et détend les ressorts de leurs efforts. Oui, c’est là chose facile ; mais aider la jeune âme, augmenter l’énergie, inspirer l’espoir, ranimer les cendres et en faire jaillir la flamme bienfaisante, racheter l’échec par une pensée nouvelle, par une conduite ferme, ce n’est pas chose aisée, c’est l’œuvre d’hommes divins.

Nous vivons sur des plans ou à des niveaux différents. Il y a une vie extérieure à laquelle l’école prépare ; on apprend à lire, écrire, compter, avoir une profession ; on apprend à saisir tout ce qu’un enfant peut acquérir, on est incité à aller de l’avant, à se rendre utile et agréable dans le monde, à monter à cheval, courir, raisonner, discuter, déployer ses talents, briller, conquérir, et posséder.

Mais la vie intérieure reste au foyer, et n’apprend nullement à faire les choses, ni à estimer ces exploits. C’est une vision tranquille et sage. Elle aime la vérité, parce qu’elle-même est réelle ; elle aime le juste, elle ne connaît rien d’autre ; mais elle ne fait pas de progrès, apparaît aussi sage dans nos premiers