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que pour écouter : les deux espèces ne valent rien. Une règle excellente pour un club serait la suivante : N’admettre aucun individu dont la présence exclut un sujet quelconque. Il faut des gens qui ne s’étonnent ni ne se choquent à tout propos, qui agissent, laissent agir, et laissent être, laissent tomber les vétilles, savent ce qui a une réelle valeur, et prennent beaucoup de choses pour accordées.

Pour les Clubs, c’est toujours en pratique une question difficile que de régler les statuts de l’élection de manière à exclure péremptoirement toutes les variétés de fâcheux. Personne ne désire les gens de mauvaises manières. Il nous faut le caractère et la loyauté. Le poète Marvell avait coutume de dire qu’il ne voudrait pas boire son vin avec un être à qui il ne pourrait confier sa vie. Mais nous ne pouvons non plus nous permettre trop de raffinement. Un homme d’une tenue irréprochable et de parfait bon sens préférait dans ses voyages se fier pour les rapports sociaux au hasard des hôtels, plutôt que de se charger de trop de lettres choisies d’introduction. Il avouait aimer une compagnie humble. C’est, disait-il, un fait incontestable que la société des bohémiens est plus intéressante que celle des évêques. La petite fille déserte le salon pour la cuisine ; le jeune garçon, pour les quais. Parents et précepteurs ne peuvent l’intéresser autant que la conversation bruyante qu’il trouve au marché ou aux docks. J’ai connu un scholar, ayant quelque expérience de la vie des camps, qui disait aimer raconter dans un café quelques histoires tragiques, et se mettre en bons termes avec le milieu ; alors, il pouvait rester aussi silencieux qu’il lui plaisait. Un scholar ne