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dépassés en ce qui concerne la rapidité d’information, aussi bien que l’horreur de leurs comptes rendus du crime. La politique n’a jamais été plus corrompue ni plus brutale ; et le Commerce, cet orgueil et cet amour de notre océan, cet éducateur des peuples, ce bienfaiteur malgré lui, aboutit par toute la terre à des délits honteux, à la duperie, et à la banqueroute.

Naturellement, nous nous tournons vers l’énumération des œuvres et inventions de l’homme comme vers une mesure de sa valeur. Mais si avec toutes ses inventions il est un coquin, nous ne pouvons prendre l’habileté mécanique ou les ressources chimiques comme mesures de la valeur. Essayons d’un autre critérium.

Qu’ont fait ces inventions pour le caractère, pour la valeur de l’humanité ? Les hommes sont-ils meilleurs ? On se demande parfois si les mœurs n’ont pas décliné à mesure que les inventions augmentaient. Voici de grandes inventions et de petits hommes. Voici la grandeur engendrée par la mesquinerie. Nous ne pouvons faire remonter les triomphes de la civilisation à des bienfaiteurs tels que nous les désirerions. Le plus grand améliorateur du monde, c’est l’égoïste et artificieux Commerce. Toute victoire sur la matière devrait faire sentir à l’homme la valeur de sa nature. Mais maintenant, on se demande qui a créé toute cette prospérité. Regardez les inventeurs. Chacun a son adresse spéciale ; son génie est pour ainsi dire en filons, et par places. Mais l’esprit grand, puissant, équilibré, nourri par un grand cœur, vous ne le trouverez pas. Chacun a plus à cacher qu’à montrer, ou est blessé par son talent même. Il n’est