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nent les statues et les tableaux. Mais je crois qu’un jour le Musée public de chaque ville déchargera les maisons particulières du soin de les avoir et de les exhiber. Je vais à Rome, et vois sur les murs du Vatican la Transfiguration peinte par Raphaël, et regardée comme la plus belle peinture du monde ; ou, dans la Chapelle Sixtine, je vois les grandes sybilles et les prophètes peints par Michel-Ange — qui tous les jours depuis trois cents ans ont enflammé l’imagination et exalté la piété de tant de vastes multitudes d’hommes de tous les pays ! Je désire rapporter à mes enfants et à mes amis des reproductions de ces figures admirables, reproductions que je peux trouver chez les marchands de gravures ; mais je ne désire pas avoir l’embarras de les garder. Je désire trouver dans ma propre ville une bibliothèque, un Musée qui soit la propriété de la ville, et où je puisse déposer ce précieux trésor, où mes enfants et moi puissions le voir de temps en temps, et où il trouvera sa place parmi des centaines de dons semblables, venant d’autres citoyens qui auront apporté toute espèce d’objets leur ayant paru de nature à devenir propriété publique plutôt que propriété privée.

Une collection de ce genre, qui serait la propriété de chaque ville, l’ennoblirait, et nous en aimerions et respecterions davantage nos voisins. Il est manifeste que toute ville pourrait s’acquitter aisément de ce devoir vraiment municipal. Chacun de nous y contribuerait avec plaisir ; et plus nous y prendrions plaisir, plus l’institution deviendrait importante.

II. Sans s’écarter de cet hommage rendu à la beauté, mais en stricte relation avec elle, on en viendra certainement à considérer la maison comme