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Goldsmith ; qui n’a vu la chaude sympathie avec laquelle, dans la cour de l’école, la grange ou le hangar, ils s’enthousiasment mutuellement de fragments de poèmes ou de chansons, de phrases du dernier discours, ou d’imitations de l’orateur ; la critique juvénile des sermons, le Dimanche ; les passages récités en classe fidèlement répétés au logis, quelquefois pour la plus grande fatigue, quelquefois pour la plus grande admiration des sœurs ; les premières joies solitaires de la vanité littéraire quand, assis en haut de la maison, on a achevé la traduction du thème ; la comparaison attentive des affiches attirantes annonçant l’arrivée de Macready, de Booth ou de Kemble, ou le discours d’un orateur fameux, avec l’indication des prix d’entrée ; la joie affectueuse avec laquelle ils accueillent le retour de chacun d’eux, après les séparations prématurées qu’exigent l’École ou les affaires ; la prévoyance avec laquelle, durant ces absences, ils amassent pour l’esprit et l’imagination des autres le miel qui s’offre à l’occasion, et la joie sans contrainte avec laquelle ils se déchargent de leurs jeunes trésors intellectuels quand les vacances les ramènent de nouveau ensemble ? Quelle est la force qui les retient ? C’est la main de fer de la pauvreté, de la nécessité, de l’austérité ; c’est elle qui, en les excluant des plaisirs sensuels qui vieillissent prématurément les autres enfants, a dirigé leur activité en des voies sûres et droites et en a fait, en dépit d’eux-mêmes, des êtres qui révèrent le beau, le grand, et le bien. Ah ! jeunes gens à courte vue étudiant les livres, la Nature, et l’homme ! trop heureux s’ils pouvaient connaître leurs avantages ! Ils soupirent après le moment où ils seront affranchis de ce joug léger de la famille ; ils