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descendent à notre seuil. Comment le faire si les besoins de chaque jour nous emprisonnent en des besognes lucratives, et nous contraignent à une vigilance continuelle, de peur d’être entraînés à la dépense ?

Donnez-nous la richesse, et le foyer existera. Mais c’est là une imparfaite et misérable solution du problème. « Donnez-nous la richesse ! » Vous demandez trop. Peu de gens ont de la fortune, mais tous doivent avoir un foyer. Les gens ne naissent pas riches ; et en travaillant à faire fortune, l’homme est généralement sacrifié, et souvent sacrifié sans s’être finalement enrichi. D’ailleurs, ce ne peut être la réponse juste — la richesse soulève des objections. La fortune est un expédient. Le sage compte sur lui-même, et non sur des ressources inférieures. Tout notre emploi de la richesse a besoin d’être revisé et réformé. La générosité ne consiste pas à donner de l’argent ou ce qui vaut de l’argent. Ces soi-disant biens, ne sont que l’ombre du bien. Donner de l’argent à un être qui souffre, ce n’est qu’une échappatoire. Ce n’est qu’une manière d’ajourner le paiement réel, un présent pour acheter le silence — un système de crédit dans lequel une promesse écrite de payer tient lieu pour l’instant du paiement lui-même. Nous devons aider l’homme par des choses plus élevées que la nourriture et le feu. Nous devons l’homme à l’homme. S’il est malade, s’il est incapable, d’un esprit vulgaire et odieux, c’est parce que toute une partie de sa nature lui est fermée. Il faudrait le visiter dans sa prison en repoussant les esprits mauvais, en lui donnant un encouragement viril, sans lui faire de vulgaires offres de condoléances parce que vous n’avez pas