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dons le prix de beaucoup de choses ; mais il en est que chacun achète sans hésitation, ne serait-ce que des timbres au bureau des postes, des billets de transport par voiture ou bateau, des outils pour son travail, des livres écrits pour sa situation, etc. Que l’homme n’achète pas autre chose que ce dont il a besoin, ne souscrive jamais à une œuvre sur les instances d’un autre, ne donne jamais à contre-cœur. Ainsi un scholar est une pierre angulaire de la Littérature. Ses dépenses sont pour Aristote, Fabricius, Érasme, et Pétrarque. Ne lui demandez pas d’aider de ses économies de jeunes drapiers ou épiciers à monter leur magasin, ou des agents pleins de zèle à influencer le Parlement, ni de se joindre à une société pour construire une factorerie ou un bateau de pêche. Il faut aussi que ces choses se fassent, mais non par des hommes comme lui. Comment une œuvre telle que les Dialogues de Platon aurait-elle pu nous arriver, si ce n’est grâce aux épargnes sacrées des scholars et à l’usage idéal qu’ils en ont fait ?

Un autre individu a le génie de la mécanique, est un inventeur de métiers à tisser, un constructeur de vaisseaux — une pierre angulaire de constructions navales — et ne mènerait rien à bien s’il se dépensait en livres et en chevaux. Un autre est un fermier — une pierre angulaire de l’agriculture — un autre est chimiste, et la même règle s’applique à tous. Nous ne devons pas chercher à éblouir avec notre argent, mais dépenser de bon cœur, et tendre en haut dans nos achats, non en bas.

J’ai peur que, envisagées à ce point de vue, nos maisons n’aient point d’unité, et n’expriment point une pensée supérieure. Le foyer, les occupations,