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tout à fait incidemment, un vers nous montre notre philosophe à genoux et en prière :

                                     devant un avenir si doux,
Ainsi que devant Dieu, plier mes deux genoux.

Ce n’est qu’un accent, une toute petite note dans l’ensemble ; mais feuilletons les quelques pages suivantes, et voyons comme elles se multiplient. Quel que soit le sujet, l’accompagnement religieux se fait enlendre. Voici des vers à une demoiselle, ce qu’on pourrait appeler un madrigal ; ce sujet profane entre tous, comment le traite-t-il ?

Douce création, dont la grâce divine
Suffit pour consoler des humaines douleurs ;
Dont l’âme, rappelant sa céleste origine
Se penche avec bonté sur nos âmes en pleurs[1] ;


et voici encore des vers d’un sonnet, sur un sujet semblable :

Oui, la femme, semblable aux doux Emmanuel,
Vers nous, des mains de Dieu, s’épancha, blanche et pure[2].

Tout à l’heure il n’était question que de Dieu ; maintenant voici le Christ : ce n’est plus la religion

  1. Premières poésies et lettres intimes, p. 17.
  2. Ibid., p. 12.