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et les bûchers terrestres seraient un châtiment trop bénin si la félicité était assurée au delà, ou du moins l’inpunité : les châtiments éternels sont seuls dignes de la grandeur du Dogme qu’il s’agit de défendre[1]. Tel est le système du christianisme d’après Leconte de Lisle : il s’oppose en toutes ses parties à l’idéal païen du poète. On comprend maintenant pourquoi dans Hypatie et Cyrille, et déjà auparavant, dans le Runoïa, et jusque dans le Barde de Temrah, où il y a pourtant des traits si sympathiques dans le caractère de l’apôtre chrétien, toutes les fois que chrétiens et païens sont mis en présence, c’est aux païens que reste le dernier mot. Qu’est-ce que Leconte de Lisle demande à la religion ? l’immortalité d’abord, ensuite ta présence du divin, l’amour divin ; or, par l’idée de l’Enfer, le christianisme corrompt l’un, et l’autre par le despotisme divin. Voilà donc le christianisme mis de côté sans préjudice pour le sentiment religieux.

Le premier cri de haine farouche que Leconte de Lisle ait poussé contre le catholicisme, on le trouve précisément dans le passage où apparaît chez lui pour la première fois l’idée de l’enfer. C’était au temps de son fouriérisme. À Rennes, quand il exaltait les bieni.

  1. « L’autre monde pesant sinistrement sur celui-ci », c’est ainsi que l’idée que Leconte de Lisle se fait du christianisme a été caractérisée par Jules Lemaître.