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La seconde question, c’est le grand et capital problème du pessimisme, reconnu par l’unanimité des critiques comme l’élément le plus constant de la personnalité de Leconte de Lisle, et interprété de tant de façons différentes. L’étude du sentiment religieux en enveloppe, pour ainsi dire, un système complet. L’explication proposée n’est pas entièrement nouvelle[1] — fort heureusement, car elle ne paraîtra pas paradoxale au moins — mais la connaissance plus exacte que nous avons aujourd’hui de Leconte de Lisle la rend à la fois si nécessaire et si importante que tout l’ensemble pivote en réalité sur elle.

Quant à la méthode que j’ai suivie, j’ai déjà parlé du point de vue historique et biographique ; la seule autre particularité dont j’aie conscience est la suivante. Peut-être rencontrera-t-on, ici ou là au cours d’un chapitre, le mot d’influence ; en tout cas, si cela arrive, ce ne sera pas souvent. Je me suis appliqué à ne jamais m’en tenir à cette vague notion dont l’usage risque toujours d’aboutir à ce qu’on ruine toute psychologie en faisant de la personnalité d’un homme un amalgame de personnalités étrangères. Il faut se rappeler que si, entre trente, cinquante, cent livres qu’un homme lit, il s’en trouve un auquel il prend un élément essentiel de sa philosophie par

  1. L’essentiel s’en retrouve dans les études de Bourget, Tellier, Spronck.