Page:Eloge de M. de Lamarck, lu à l'Académie des Sciences le 26 novembre 1832.djvu/14

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M. de Lamarck officier, bien que ses instructions lui prescrivissent d’être fort réservé de ces sortes de promotions. Peu de temps après, M. de Lamarck fut nommé à une lieutenance ; mais un si heureux début n’eut pas pour sa fortune militaire les suites qu’il en aurait pu attendre ; l’accident le plus imprévu l’enleva même au service et lui donna une destination toute nouvelle. Son régiment avait été à la paix envoyé en garnison à Toulon et à Monaco ; là, un de ses camarades, en jouant, le souleva par la tête, et lui occasionna dans les glandes du cou un dérangement grave qui, vainement combattu sur les lieux, l’obligea de venir à Paris se confier à des mains plus habiles ; les soins de divers chirurgiens renommés n’eurent pas plus de succès, et le danger était devenu très-imminent, lorsque notre confrère feu M. Tenon, avec sa sagacité ordinaire, reconnut le mal et y mit fin par une opération compliquée dont M. de Lamarck a toujours conservé de profondes cicatrices. Ce traitement lui prit une année, et pendant ce temps, l’extrême exiguïté de ses ressources le confina dans une solitude où il eut tout le loisir de se livrer à la méditation.

La profession des armes ne lui avait pas fait perdre de vue les notions de physique qu’il avait reçues au collége.

Pendant son séjour à Monaco, la végétation singulière de cette contrée rocailleuse avait fixé son attention, et le Traité des plantes usuelles de Chomel, tombé par hasard dans ses mains, lui avait donné quelque teinture de botanique. Logé à Paris, comme il l’a dit lui-même, beaucoup plus haut qu’il n’aurait voulu, les nuages, qui faisaient presque tout son spectacle, lui inspirèrent, par leurs divers aspects, ses premières idées de météorologie ; c’était plus de sujets qu’il n’en fallait pour échauffer une tête qui a toujours été active et originale.