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deux, dit Ben[1] Winthrop. Le vieux monsieur a un don naturel. Tenez, le squire avait l’habitude de l’inviter à prendre un verre, simplement pour l’entendre chanter le Corsaire rouge[2] ; n’est-ce pas, monsieur Macey ? C’est un don naturel. Voilà mon petit garçon, Aaron, il a aussi un don naturel : il peut vous chanter un air sans hésiter, comme une grive. Mais quant à vous, maître Tookey, vous feriez mieux de vous en tenir à vos Amen. Votre voix est assez bien lorsque vous la gardez dans le nez. C’est votre intérieur qui n’est pas fait comme il faut pour la musique : il ne vaut pas mieux que le creux d’un sabot. »

Cette sorte de franchise inflexible était la forme de plaisanterie la plus piquante aux yeux de la société de l’Arc-en-Ciel ; et l’insulte de Ben Winthrop fut considérée par tout le monde comme ayant surpassé l’épigramme de M. Macey.

« Je vois assez clairement ce qu’il en est, » dit M. Tookey, incapable de rester calme plus longtemps. « Il y a une conspiration pour me chasser du chœur, afin que je n’aie point ma part de l’argent de Noël. Voilà ce que c’est. Mais je parlerai à M. Crackenthorp ; je n’entends pas qu’aucune personne se joue de moi.

— Non, non, Tookey, dit Ben Winthrop. Nous vous donnerons votre part pour que vous vous reti-

  1. Abréviation de Benjamin. (N. du Tr.)
  2. Texte : The Red Rover, chanson populaire, en Angleterre. (N. du Tr.)