du soir, la jolie Nancy Lammeter, à l’époque où elle atteignait sa vingt-troisième année, possédait son petit code immuable, et elle avait strictement formé chacune de ses habitudes d’après ce code. Portant en elle ces jugements définitifs avec le plus de discrétion possible, ils s’enracinaient dans son esprit, et y croissaient aussi tranquillement que l’herbe dans les prairies. Bien des années auparavant, nous le savons, elle insistait pour s’habiller comme Priscilla, parce qu’« il était raisonnable que deux sœurs se vêtissent de la même manière », et qu’« elle ferais ce qui était juste si elle mettait une robe teinte en jaune couleur fromage ». C’est là un exemple trivial, mais caractéristique, de la façon dont la vie de Nancy était réglée.
Un de ces principes rigides, et non point un sentiment mesquin d’égoïsme, avait été le motif de la résistance obstinée de Nancy au désir de son mari. Recourir à l’adoption, parce qu’il vous avait été refusé d’avoir des enfants, à vous, c’était essayer de choisir son sort malgré la Providence. L’enfant adopté — elle en était convaincue — ne tournerait jamais bien. Ce serait une cause de malédiction pour les rebelles qui auraient, de propos délibéré, recherché un bien dont — en vertu de quelque suprême raison — il valait évidemment mieux pour eux être privés que de le posséder. Voyait-on qu’une chose ne devait pas exister, disait Nancy, c’était un devoir strict de renoncer même au désir de l’obtenir. Et, à cet