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tement. Nancy n’était pas assez instruite en théologie pour discerner très clairement les rapports qui existaient entre sa vie simple et obscure, et les documents sacrés des premiers temps, qu’elle consultait sans méthode. Mais l’esprit de droiture et la conviction qu’elle était responsable des effets de sa conduite sur les autres, qui étaient des éléments puissants de son caractère, lui avaient fait contracter l’habitude de scruter les sentiments et les actions de son passé, avec le soin minutieux d’un examen de conscience. Comme son esprit n’était pas sollicité par une grande variété de sujets, elle remplissait les moments d’intervalle en revivant sans cesse intérieurement tout ce qui lui revenait en mémoire des faits de son existence, — de ceux surtout des quinze années écoutées depuis son mariage, et pendant lesquelles la vie et son but s’étaient doublés à ses yeux. Se rappelant les petits détails, les mots, les tons ce voix et les regards dans les scènes critiques qui lui avaient ouvert une ère nouvelle, soit en lui donnant une connaissance plus approfondie des rapports et des épreuves de ce monde, soit en l’invitant à quelque petit effort d’indulgence ou d’adhésion pénible à un devoir imaginaire ou réel, elle se demandait continuellement si elle avait été blâmable en quoi que ce fût. Cet excès de réflexion et cet examen de conscience outré sont peut-être une habitude morbide, inévitable chez un esprit d’une grande sensibilité morale, privé de sa part légitime d’activité