alors que la jeune fille aurait appris à comprendre quel père dévoué Silas avait été pour elle. L’enfant faisait rechercher à Marner des images de cet avenir, dans les liens et les œuvres charitables qui unissaient entre elles les familles de ses voisins. L’or l’avait obligé à rester de plus en plus longtemps à son travail, les oreilles et les yeux fermés à toute chose, si ce n’est à la monotonie de son métier et à l’uniformité de son tissu. Mais Eppie le dérangeait de son labeur, et lui en faisait regarder toutes les interruptions comme des moments de fête. Sa jeune vie réveillait les sens de Silas au point de ranimer la joie de celui-ci, même à la vue des vieilles mouches engourdies de l’hiver, qui sortaient en rampant avec peine aux premiers rayons de soleil du printemps. L’enfant ravivait la joie du tisserand, parce qu’elle-même était joyeuse.
Quand l’éclat du soleil était devenu plus vif et se prolongeait davantage, et que les boutons d’or parsemaient les prairies, on pouvait voir Silas, — soit au milieu du jour ensoleillé, soit au déclin de l’après-midi, au moment où les ombres s’allongeaient sous les haies, — on pouvait voir Silas, la tête nue, sortir de chez lui pour se promener, et portant Eppie au delà des Carrières, dans les lieux où croissaient ces fleurs. Il s’arrêtait près de quelque talus favori qui lui permettait de s’asseoir, tandis qu’Eppie allait en chancelant cueillir les boutons d’or, interpellant les créatures ailées qui murmuraient avec bonheur au-dessus de leurs pétales brillants, et attirant conti-