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et de plus court en fait de tailles. Elles étaient examinées par Mlle Ladbrook — des Vieux-Pâturages — avec une fausse honte qui n’était pas sans être accompagnée d’une critique secrète. Mlle Ladbrook sentait bien que les demoiselles Gunn devaient regarder sa jupe comme étant d’une ampleur exagérée ; mais, en retour, n’était-il pas dommage que les demoiselles Gunn fussent dépourvues de ce jugement qu’elle n’eût pas manqué de montrer à leur place en restant un peu en deçà de la mode. D’un autre côté, Mme Ladbrook, en coiffe et en tour de cheveux, le turban à la main, faisait une révérence et souriait avec douceur, en disant : « Après vous, je vous prie, » à une autre dame qui se trouvait dans la même situation qu’elle-même, et lui avait poliment offert la préséance à la glace.

Mais Mlle Nancy n’eut pas plutôt fait sa révérence, qu’une dame d’un certain âge s’avança. Le fichu de mousseline extrêmement blanc de cette dame, et la cornette qui entourait ses boucles de cheveux gris et lisses, formaient un contraste frappant avec les robes bouffantes de satin jaune, et les coiffures à fontanges de ses voisines. Elle s’approcha de Mlle Nancy avec beaucoup d’afféterie, et lui dit lentement, d’une voix aiguë et suave :

« Ma nièce, j’espère que vous êtes en bonne santé. »

Mlle Nancy baisa respectueusement la joue de sa tante, et répondit avec une afféterie aussi aimable :