Page:Eliot - Scenes de la vie du clerge - Barton Gilfil.pdf/74

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

retenue dans sa chambre, et qui dépassa un peu trop les bornes de la patience et de la longanimité de la vieille dame. M. Barton était un peu vif ; mais, d’un autre côté, on sait que les vieilles dames célibataires sont parfois susceptibles ; aussi nous ne supposons pas que tout le tort fût du côté du ministre, d’autant qu’il avait intérêt à maintenir en bonne humeur un hôte dont la présence éloignait la gêne de sa maison. Il y avait déjà près d’une année que miss Jackson était partie, et avec un peu d’attention on aurait pu constater bien des embarras dans la tenue du ménage.

Il arriva aussi une triste chose. Lorsque la dernière neige fut fondue, que les crocus jaunes parurent dans le jardin, que la vieille église fut à moitié abattue, Milly devint malade et obligée à un repos complet pendant quelque temps. M. Brand, le docteur de Shepperton, si opposé à M. Pilgrim, ordonna à Milly de boire du vin de Porto, et il fallut avoir souvent une femme de peine pour aider Nanny dans les travaux supplémentaires qui l’accablaient.

Mme Hackit, qui ne faisait presque jamais de visite, si ce n’est à sa plus proche voisine la vieille Mme Patten, fit alors la démarche inusitée de se rendre un matin à la cure ; et ses yeux se remplirent de larmes quand elle vit Milly pâle et faible assise dans le parloir, incapable de continuer à coudre le sarrau posé sur la table devant elle. Le petit Dickey, turbulent garçon de cinq ans, aux grosses joues rouges, aux jambes solides, dont le tour était venu d’être assis près de maman, s’était blotti à ses genoux, tranquille comme une souris, tenant dans ses petites mains rouges, aux ongles noirs, la main blanche de